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Burkina Faso : Rapatriement des biens cultuels Africain

Installation des experts chargés de mener le travail.
Le comité chargé de l’élaboration d’une stratégie sur le processus de restitution des biens cultuels se trouvant dans les musées en France a été officiellement installé ce 07 novembre 2019 à Ouagadougou.

Il s’agit, selon le Directeur général du patrimoine culturel, Vincent Sédogo, d’un groupe de six experts nationaux issus des professionnels de musée et du patrimoine, des universités et centres de recherche, de la société civile culturelle. Le comité de ce pool d’experts est présidé par le Pr Jean Célestin Ky, enseignant de l’art contemporain à l’Université Joseph Ki-Zerbo de Ouagadougou.

Présidant cette cérémonie, le Directeur de Cabinet du Ministre, Nestor Kahoun, a indiqué, que ces experts auront la mission de mener un travail de recherche de fond, de planification, de formation et de documentation. Pour ce faire, il les a exhorté à travailler dans un esprit de solidarité partagé car dit-il <>

La balle est désormais dans le camp de ce comité. Il reste à mettre en place un calendrier de travail avec une feuille de route bien définie, a confié, le Président du Comité, Jean Célestin Ky.

Pour l’Afrique, “des dommages difficilement évaluables”
Tenant parole, Emmanuel Macron avait chargé [l’historienne française] Bénédicte Savoy et [l’universitaire sénégalais] Felwine Sarr de réfléchir au retour en Afrique des œuvres d’art. Leur rapport, qui a été remis au président de la République le 23 novembre, alimente la polémique, car les deux experts n’ont retenu que l’option de la restitution pérenne.

Beaucoup de ces objets proviennent du pillage en règle organisé par les administrateurs coloniaux ou par des collectionneurs d’art européens conquis assez vite par ce que l’on a pendant longtemps désigné sous le vocable d’“arts primitifs”. Au sortir de l’ère coloniale, le pillage, avec parfois la complicité de trafiquants africains appâtés par le gain facile lié aux prix exorbitants de ces objets sur le marché international, a continué d’être la face sombre des relations entre l’Afrique et l’Europe. [Aujourd’hui au moins 90 000 objets d’art d’Afrique subsaharienne sont dans les collections publiques françaises, dont 46 000 “acquises” pendant la période coloniale].

Les dommages subis par le continent du fait de ce pillage sont difficilement évaluables, car de nombreuses sociétés africaines y ont perdu leur âme, les référents matériels et culturels de leur passé qui leur permettait de se projeter dans l’avenir. [Entre 85 à 90 % du patrimoine africain serait aujourd’hui hors du continent.]

“Les Français auront du mal à se séparer du butin”
Un aspect de la polémique tourne autour de cette question : “Qu’adviendra-t-il du musée du quai Branly [à Paris] dont l’essentiel des collections est constitué d’objets d’art africains ?” Des réponses techniques simples peuvent être apportées, comme faire évoluer les missions du musée ou fabriquer des doubles des objets à restituer. Mais c’est toute la question de l’attrait touristique de la ville de Paris et ses implications financières qui sont ici soulevées.

On le sait, les musées constituent l’une des mamelles nourricières du tourisme français, et le rapatriement des biens culturels africains qui y trônent ne peut manquer de porter un coup à l’éclat d’une ville qui s’enorgueillit de sa richesse culturelle.

Aussi, ils sont nombreux les Français qui auront du mal à se séparer de ce butin qu’ils considèrent comme faisant partie de leur patrimoine historique, témoin de leur aventure coloniale au XIXe siècle, et surtout source d’inspiration pour de nombreux maîtres de l’art en Europe. Est de ceux-là le grand Picasso, pour ne citer que le peintre espagnol. On comprend ainsi le manque d’enthousiasme de nombreux conservateurs de musée qui estiment que la culture ne devrait pas se plier à un quelconque agenda géopolitique.

“Macron aura-t-il le courage d’aller au bout ?”
On a toujours opposé au rapatriement du patrimoine culturel africain sommeillant dans les galeries d’art en Europe l’inexistence en Afrique de structures adéquates pour sa conservation et la faiblesse des politiques étatiques de préservation. Si l’on ne peut balayer du revers de la main ces arguments, force est d’admettre que la place de ces objets ne se trouve pas forcément dans les musées.

Ils peuvent être au sein des communautés qui les ont le plus souvent créés, non en raison de leur valeur esthétique, mais surtout en raison de leur valeur fonctionnelle. Par exemple, la place d’un masque n’est pas au musée, mais dans l’arène de danse où il entre, pour des raisons bien précises, en interaction avec la communauté qui l’a créé.

Au regard de la polémique qui enfle et des intérêts en jeu, on peut se demander si Emmanuel Macron aura le courage d’aller jusqu’au bout de son idée. Et c’est justement là que les États africains et les communautés spoliées ont un rôle important à jouer. Ils doivent donner de la voix, et utiliser l’imposant arsenal juridique à leur disposition.


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