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PHOTOS : la dernière génération de scarifications en Afrique

La série de photos de Joana Choumali, « Hââbré, The Last Generation », raconte les derniers souffles d’une tradition mourante. En Kô, ce mot signifie "« écrire », mais désigne aussi la pratique de la scarification encore bien présente en Afrique de l’ouest.

Elle consiste à pratiquer des incisions superficielles sur la peau à l’aide de pierres, de verre ou de couteaux.

Mme K. Djeneba, gérante de boutique, du Burkina Faso.

« Les gens trouvent ça beau, moi je trouve ça laid. Nous ne sommes pas comme les autres. Auparavant j’aimais mes cicatrices et je m’en vantais. Mais aujourd’hui, en ville, c’est passé de mode. »

De la Papouasie Nouvelle-Guinée à l’Éthiopie, les cicatrices sont autant de manières d’exprimer une identité, que ce soit l’appartenance à une communauté, le passage à l’âge adulte ou une connexion avec un groupe spirituel.

Joana Choumali, qui vit à Abidjan, en Côte d’Ivoire, a découvert la scarification dans les années 80. « Je me souviens de M. Ekra, le chauffeur qui me conduisait à l’école. Il a avait de grandes cicatrices qui lui couvraient le visage des tempes au menton », se souvient-elle.

M. Mien Guemi, peintre, de Ouro Bono, Burkina Faso.

« J’étais un enfant, mais je me souviens encore des blessures. Si vous n’en aviez pas, vos amis se moquaient de vous et vous ignoraient. En période de guerre, les tribus Mossis et Ko se reconnaissaient, et ainsi évitaient de s’entre-tuer. Pas besoin de carte d’identité, je porte déjà mon identité sur mon visage. Mais aujourd’hui c’est terminé. On ne peut plus être reconnus. »

La pratique de la scarification a peu à peu disparu. Les porteurs de cicatrices étaient de plus en plus moqués dans les zones urbaines en expansion. Les pressions exercées par les autorités religieuses et gouvernementales dans le sens d’une « modernisation », couplées avec l’arrivée des étoffes dans les tribus, ont amené une disparition progressive de la scarification.

Boudo B., 45 ans, chauffeur de taxi, tribu Ko du Burkina Faso.

« Aujourd’hui, si je pouvais les effacer, je le ferais... Ce n’est pas facile d’aller voir les filles avec ça. »

« Hââbré, c’est la dernière génération qui vit avec des cicatrices sur le visage », explique Joana Choumali. « J’ai fait cette série pour ne pas oublier. »

Mme Sinou, commerçante, de la tribu Ko au Burkina Faso.

« Je suis née au Ghana. Ma tante m’a emmenée au village, ils m’ont fait les cicatrices sans le consentement de mon père. Je refuse de le faire à mes enfants. »

M. Konabé, tailleur, tribu Ko du Burkina Faso.
M. Sinou, tailleur, tribu Ko du Burkina Faso.

« Si l’on pouvait les enlever, on le ferait. On a honte d’être si différents des autres. »

M. Lawal E., coiffeur, tribu Yoruba du Nigéria.

« Je suis fier de mes marques. Le Roi a les mêmes. Je fais partie de la famille royale dans mon village. Ici, en ville, je ne suis personne. »

Salbre S., jardinier, tribu Bissa du Burkina Faso.

« Je suis à la retraite maintenant. Nous sommes la dernière génération. Aucune personne âgée de moins de 40 ans n’a de scarifications. »

Pousnouaga S., 45 ans, jardinier, tribu Bissa du Burkina Faso.

« L’une de mes tantes me l’a fait. Nous avons payé avec du beurre de karité et des pintades. Çe na me plaît pas, et ça appartient au passé. »

Mme Martina Kaboré, 39 ans, femme au foyer, de Ouemkanga, Burkina Faso.

« À 10 ans, j’ai demandé qu’on m’en fasse. je voulais être comme mes frères et sœurs, et montrer mon courage. Les temps ont changé, mais c’est normal. quand les gens me pointent du doigt, je reste droite et fière. »

Mme Kouya Benin, femme au foyer, tribu Ko du Burkina Faso.

« Les gens se rendaient en groupes faire leurs scarifications, et j’y suis allée avec mes amis… Aujourd’hui, ces pratiques sont interdites par la loi au Burkina Faso. »

quebec.huffingtonpost


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